Pâques ou la parole qui renonce au pouvoir

Pâques est le symbole du passage. Mais de quoi ?

Les étincelles de lumière que nous sommes ont rencontré très tôt, parfois même in utero, la dévalorisation, le non-accueil et, dans l’inconscient collectif, tant d’autres relations inachevées.

La création, pour accomplir l’amour, naît sans cesse pour rencontrer chaque parcelle de cet inconscient qui, isolée et malheureuse, répète.

La mémoire tragique et les émotions ont quelque peu programmé l’ADN de cellules qui viennent aussi de la lumière. Mais elles risquent de n’écouter que sur la base de la biologie ou d’une psychanalyse enfermée dans le sombre de l’inconscient.

L’accouchement humain est vécu comme libérateur. Comme un symbole archétypal de la différenciation. Comme l’émergence d’un nouveau visage.

Mais Pâques, par sa profondeur extrême et sa vastitude, explose et démultiplie complètement cet archétype. Seconde naissance ! Spiritualité.

Il ne s’agit plus de vivre avec les mémoires et leurs discours accrochés à nos basques. Il s’agit, après les avoir visitées et honorées, de les quitter au point, presque, en changeant de langage, de changer de corps physique et de corps émotionnel. L’écrasement parfois ressenti, ce n’est pas de la densité, mais le son douloureux de paroles sans espérance.

Il s’agit donc, en conscience de lumière, d’aller dans une parole qui n’est plus traversée par le pouvoir et d’accepter qu’elle nous traverse enfin.

Plus de pouvoir !

Le symbole pascal est là.

La résurrection est une parole. Ne nous arrêtons pas au corps.

Le vendredi saint, avec ses jugements dominés par le politique jusqu’à la crucifixion, est dans la parole tragique. Démonstration ultime de l’absurde du pouvoir et de la projection sur l'autre.

Dimanche, aujourd’hui, demain, saurons-nous ressusciter notre parole ?

Et dans la simplicité du cœur, saurons-nous quitter tout transfert, toute hiérarchie, toute institution pour parler l’amour d'âmes à âmes ?

Et, précisément, sans pouvoir.

Georges Didier